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Noces (Camus)

Par François Mangin-Sintès.

Noces à Tipasa est le récit liminaire d'un recueil de textes parus en 1938. Un jeune homme se promène au milieu de la nature dans les ruines romaines d'une petite localité située au bord de mer, à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest d'Alger. C'est le printemps, le soleil est au zénith. Ce jeune homme aime passionnément la vie. Il chante sa joie de vivre dans la beauté et son orgueil d'aimer sans mesure. Le monde sourit mais seulement à celui qui sait le regarder. Dans cette débauche de nature, "d'absinthes, d'héliotropes, de géraniums, de ciel qui vacille, de laines grises, d'essences qui fermentent, de lentisques, de genêts, de fleurs violettes, rouges, jaunes, de mer qui suce les premiers rochers avec un bruit de baisers", dans ce grand libertinage qui est aussi un mariage, le jeune homme accomplit son métier d'homme. C'est ce que comprend le mot Noces. C'est aussi, voir, sentir, entendre, toucher, embrasser, caresser, étreindre. La baignade, le contact direct de la chair nue avec l'eau, avec la terre, est ce qui le rapproche le plus du monde. Noces s'adresse à la totalité du corps. C'est aussi connaître le saisissement, la montée du plaisir et enfin la satisfaction du plaisir repu, comme avec le corps d'une femme. Dans ce «silence énorme», hors norme, dans cette joie étrange aux harmonies chromatiques de vert et de noir, le narrateur devient l'interprète des émotions qu'il éprouve. Il est aussi le contemporain de sa propre vie, c'est à dire un homme qui se sent comme un acteur. Il réalise l'expérience de son humanité. Au milieu des ruines et des tombes, il nous rappelle dans un élan mystique, le sublime de la vie et le tragique de la mort, l'envers et l'endroit de sa métaphysique à venir. Ce texte de jeunesse d'une densité diamantine à nulle autre pareille le relie à jamais, ad mortem, à sa terre natale perdue, à la mer, à la mère.

 

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